Pourquoi tester le stabilisateur de votre objectif ? La plupart des photographes se contentent d’utiliser, les yeux fermés, ce génial accessoire dont nous avons parlé dans un précédent article. Mais en réalité, entre publicité un peu mensongère (ou très optimiste) et la réalité sur le terrain, il y a parfois un écart considérable, que dis-je, un gouffre, un précipice …
Pourquoi faut-il tester le stabilisateur de votre objectif ?
Sur le papier, promis, craché, juré, le stabilisateur de votre objectif vous fera gagner 3, 4, voire 5 vitesses. Enfin ça, c’est ce que vous a dit la publicité. Et sur le terrain, vous avez essayé? Et bien, la réalité est un peu différente, et les résultats assez éloignés des promesses. Bref, il vaut mieux tester le stabilisateur de votre objectif – ou de vos objectifs. Comme ça vous saurez vraiment quels sont les gains et pourrez adapter votre pratique, non pas sur un argument publicitaire, mais sur de vraies valeurs. Car le matériel n’est pas seul en cause, votre façon de tenir votre appareil joue aussi énormément. Et là selon que vous êtes tireur d’élite ou atteint d’une forme grave de la maladie de Parkinson, ce peut être le grand écart.
Comment tester le stabilisateur de votre objectif
C’est très simple et rapide, mais il faut de la méthode. Choisissez une journée ensoleillée et lancez-vous. Cela ne vous prendra qu’une petite demi-heure par objectifs (résultats compris).
Voici le matériel dont vous avez besoin : un trépied, votre appareil, votre objectif et de quoi noter.
Choisissez un objet assez gros avec une texture bien visible (tronc d’arbre, objet en pierre ou en vieux bois, etc.). Placez-le de façon à ce qu’il soit éclairé de côté. La lumière rasante étant celle qui donne le plus de netteté apparente, elle permet de mieux lire les images et donc de comparer. Vous pouvez ajouter un petit texte écrit noir sur blanc, assez gros dans votre cadrage, pour visualiser le flou de bougé, mais ce n’est pas indispensable.
Réaliser une vue test
Commencez par réaliser la vue de référence qui vous permettra de comparer les suivantes. Cette vue se fait sur trépied, stabilisateur désactivé et retardateur activé ou télécommande. Pour les possesseurs de boitier Nikon, vous pouvez utiliser la géniale fonction « Temporisation miroir levé » (menu configuration / tempo / mémo / expo). Faites une image pour chaque focale si vous avez un zoom, en utilisant une vitesse supérieure à la vitesse minimale de sécurité. Soit 1/250° de sec. pour une focale de 200 mm avec un boitier plein capteur. Si vous ne savez pas calculer la vitesse de sécurité, consultez cet article (ou venez en stage).
Voici un petit tableau listant les vitesses à utiliser pour éviter le flou de bougé – lorsque l’on n’a pas de stabilisateur. Utilisez ces vitesses pour votre vue test sur trépied.
Focale - Boitier APS-C | Vitesse minimale - sans stabilisateur | Focale - Boitier 24x36 - FF | Vitesse minimale - sans stabilisateur |
---|---|---|---|
18 mm | 1/25° - 1/30° seconde | 28 mm | 1/30° seconde |
23 mm | 1/30° - 1/40° seconde | 35 mm | 1/30° - 1/40° seconde |
35 mm | 1/50° - 1/60° seconde | 50 mm | 1/50° - 1/60° seconde |
50 mm | 1/75° - 1/90° seconde | 75 mm | 1/75° - 1/90° seconde |
70 mm | 1/90° - 1/100° seconde | 105 mm | 1/100° - 1/125° seconde |
90 mm | 1/135° - 1/150° seconde | 135 mm | 1/150° - 1/160° seconde |
100 mm | 1/150° - 1/160° seconde | 150 mm | 1/160° - 1/180° seconde |
135 mm | 1/200° - 1/250° seconde | 200 mm | 1/200° - 1/250° seconde |
200 mm | 1/300° - 1/350° seconde | 300 mm | 1/300° - 1/350° seconde |
300 mm | 1/450° - 1/500° seconde | 450 mm | 1/450° - 1/500° seconde |
400 mm | 1/600° - 1/750° seconde | 600 mm | 1/600° seconde |
500 mm | 1/750° - 1/800° seconde | 750 mm | 1/750° seconde |
600 mm | 1/900° - 1/1000° seconde | 900 mm | 1/900° - 1/1000° seconde |
Utilisez une ouverture de f8 pour avoir une qualité optimale et ajustez la sensibilité ISO pour obtenir la vitesse désirée. Par beau temps, ce ne sera pas un problème. L’idée est de faire une vue où l’on est certain que l’appareil n’a pas bougé. Il faut donc soigner celle-ci.
Tester le stabilisateur de votre objectif
Une fois la vue test réalisée, prenez votre appareil à main levée, réactivez le stabilisateur et enlevez le retardateur (ou la temporisation). Gardez l’ouverture de f8 et faites varier les vitesses. Démarrez par une vitesse supérieure à la vitesse de sécurité puis baissez d’une valeur à chaque fois – jusqu’à 5 ou 6 valeurs en dessous la vitesse de sécurité. Notez simplement le N° de la vue de référence – réalisée sans stabilisateur et sur trépied,car les données EXIF de l’appareil ne font pas apparaitre ces 2 infos. Pour me retrouver plus facilement, je sépare les séries sur chaque focale en photographiant ma main … (voir photo ci-dessous)
Examen des résultats
Une fois le test réalisé, déchargez vos images dans votre logiciel favori et examinez le résultat. Repérez la vue de référence pour chaque focale et comparez-la avec celles réalisées à main levée, en zoomant à 100% là où vous avez fait le point. Notez les résultats de cette façon :
Focale 100 MM : 1/100° OK – 1/50° OK – 1/25° moyen – 1/10° flou … et faites de même pour les principales focales si c’est un zoom.
Voici ma méthode dans Lightroom : je filtre les images par focale (Filtres / métadonnées / distance focale) et les affiche par heure de capture (Tri / heure de capture). Ensuite, je compare les photos 2 par 2. Cela va très vite.
L’intérêt de ce test est de vous donner des résultats personnalisés. Votre objectif, votre façon de tenir votre appareil = tel ou tel gain de vitesse.
Par exemple dans mon test de l’objectif Fuji 70/300 MM, le gain annoncé par le fabricant sur le boitier XT4 avec stabilisateur intégré au capteur est de 4 à 5 stops (vitesses). Le test a montré un gain maximal de 3 vitesses avec des différences importantes entre la focale de 70MM (4 vitesses) et le 300MM (3 vitesses, mais pas à chaque fois).
Intégration des résultats dans votre processus de prise de vue
Maintenant que vous avez vos résultats, vous savez combien de vitesse vous pouvez gagner en moyenne. Il ne vous reste plus qu’à définir (et retenir) vos vitesses basses maxi en fonction des focales les plus importantes. Sur le terrain, lorsque vous tenez votre appareil en mode portrait (vertical) ou que vous êtes dans une position compliquée, vous pouvez enlever 1 vitesse. Idem si vous êtes fatigué(e) après une longue randonnée, etc.
Tant que vous y êtes, vous pourriez aussi tester votre objectif pour voir son piqué ou s’il souffre de gros défauts optiques et savoir à quelle ouverture il est le meilleur.
Voilà, j’espère que ce petit article vous permettra d’utiliser votre matériel encore plus efficacement.
À bientôt pour la suite et merci de partager sur vos réseaux.
Philippe Body, votre photographe formateur
Philippe photographe de voyage professionnel a deux passions : la photographie et le voyage. Après … lire plus
Super article ! Je me suis mis aussitôt à tester mes objectifs. Mais selon mon expérience toute récente, pour le test il faut choisir son sujet ni trop lumineux, ni trop sombre, comme on change de 7 diaphragmes il faut éviter de trop monter en ISO.
Salut Bernard, oui la montée en iso peut fausser les résultats … tu as raison.
Photographe animalier (avec du matériel Canon APS-C et plein format) intervenant souvent en basse lumière et recherchant une netteté parfaite, j’accorde une confiance limitée aux systèmes de stabilisation. Je ne descends jamais au dessous de 2 vitesses, surtout avec des téléobjectifs. Je préfère monter les ISO jusqu’à 1600 ISO, voire 3200 sur du 24/36.
En post-production, le « bruit » (le grain) se réduit facilement (notamment avec DXO), le flou, jamais !
Bonjour Jean, tu as raison de ne pas faire confiance à la pub, mais le test permet de vraiment savoir où l’on va. Avec les nouveaux boitiers et la stabilisation intégrée au capteur, il y a des gains plus importants etc’est toujours bon à prendre, en animalier notamment.
Bon WE