Et voici notre première analyse d’image et l’on commence par la couverture du second volume de la Grammaire de l’image, consacré justement à l’écriture photographique.

Analyse d’image – la couverture du volume 2

Voici l’image originale de la couverture du volume 2. Pour l’impression, elle a été recadrée.  Essayez de trouver (en gros) les données de prise de vues suivantes :

  • Vitesse :
  • Ouverture :
  • Focale :

Sur quels indices vous êtes-vous basés ?

analyse d'image

Réponse – Analyses d’images

Exif : 1/200° de seconde / f/4 – Focale 28 mm – La photo est nette, mais le seul personnage vivant est immobile. En soi, ce n’était pas une priorité, mais comme la focale est courte, je suis très proche de l’homme, je devais donc déclencher rapidement, dans le mouvement …  J’ai opté pour une vitesse assez rapide en sacrifiant un peu l’ouverture, mais avec un 28 mm pas de problème de profondeur de champ, car l’homme est près du mur. Il y avait un piège, car au grand angle, il y aurait dû y avoir une déformation des lignes du mur derrière, mais je me suis placé pile en face et bien parallèle à celui-ci, pour éviter les déformations en trapèze. Je me suis baissé pour que mon appareil soit bien de niveau. Il y a quand même un léger décalage sur les bords des lignes du faux mur de la fresque.

Technique de composition :  juxtaposition / confusion des plans / absence de profondeur

C’est comme s’il y avait 2 images (la ligne verticale verte), qui s’ignorent (chacun regarde dans une direction différente et rien ne les relie). Celle de l’homme au téléphone d’un côté et celle du mandarin écrivant ses idéogrammes de l’autre. L’intérêt de cette image est dans la juxtaposition des 2 personnages (1 et 2) et des attitudes. Ils s’ignorent, mais ils se ressemblent. Tous les 2 écrivent ou consultent (on ne sait pas trop pour l’homme au téléphone). Tous les 2 sont assis et concentrés sur leur activité, la tête légèrement baissée. Ils portent des vêtements de même couleur et sont d’une taille assez proche. L’intérêt est dans la juxtaposition des 2 qui souligne le décalage dans le temps. Outre les attitudes proches, ce sont les couleurs du fond : le jaune  (3 – 4 et 5) et le rouge (6 – 7 et 8)  qui contribuent à harmoniser et à créer un chemin dans l’image.

Plusieurs facteurs contribuent à mettre en avant cette juxtaposition : il y a très peu d’indices visuels pour se figurer la profondeur (pas d’ombres, pas de perspectives, 2 plans très rapprochés). Donc l’image est plate et cela sert le propos qui est de mettre la fresque et la personne vivante au même niveau. Seules les jambes de l’homme sont sur un plan différent ce qui retarde la compréhension (fresque / personnage vivant). Toujours au niveau des couleurs, la nappe rouge de la fresque attire beaucoup l’œil (faiseurs de rois) et contribue à donner à attirer d’abord l’attention sur le mandarin, ce sens de lecture (mandarin + nappe, puis hommes sur sa chaise) sert l’intention première.

Les autres cadrages

Continuons notre analyse d’image en observant ces autres photos faites le même jour. Est-ce qu’elles vous paraissent aussi intéressantes ? Laquelle des 2 préférez-vous ?

les autres versions

(Fig. 2)

 

(Fig. 3)

Enfin, regardez cette dernière image. Est-elle aussi bonne que la première (celle de la couverture) ? Essayez de mettre sur papier vos raisons …

les autres versions

(Fig. 4)

Réponses

La Figure 2 est brouillonne et ratée. D’ailleurs, elle a fini dans la poubelle.

La Figure 3 est un peu plus intéressante, mais elle ne dit rien. Pas de réelle intention, ni de sens. On ne voit pas non plus ce qu’il se passe. Poubelle.

Enfin, la Figure 4 est la meilleure des 3 autres. On y voit sur la même image 3 générations. Le mandarin, le Bo Doi avec son casque et sa tenue militaire symbole d’un Vietnam des années de guerre et d’après guerre et enfin un enfant sur un vélo moderne. Ici, c’est le passage du temps qui est mis en valeur. Il y a une intention. Mais le mandarin sur la fresque n’est pas relié aux 2 autres personnages ce qui enlève de la puissance au cliché. L’image est également plus brouillonne. Elle est aussi, moins lisible que la première, simplement parce qu’il y a plus de fond, de personnages, bref d’informations. La lumière est aussi bien moins favorable. Cette fois, il y a des ombres qui donnent de la profondeur et donc les différents plans se confondent moins. Le flou de mouvement sur le vélo joue également contre l’équipe en soulignant que l’enfant est sur un plan différent.

Conclusion

Sur place tout va très vite. J’ai préréglé mon appareil (vitesse / ouverture / ISO) avant de me rapprocher de la scène. Ensuite, je me suis mis sur la route à 2 mètres des fresques et j’ai calé ma focale) pour ne pas avoir à le faire au moment du déclenchement. J’ai marché vers la scène et au niveau de l’homme, je me suis arrêté et baissé. Je n’ai eu le temps de faire qu’une vue, car il a aussitôt levé la tête (ci-dessous). One shot donc. J’espère que cette petite séance d’analyse d’image vous a plu. Si c’est le cas, n’hésitez pas à partager et abonnez-vous au blog (ci-dessous) pour ne pas rater les prochaines – vous serez prévenu par mail. Et pour tout savoir sur l’analyse d’image, le patron, les faiseurs de rois, la hiérarchie des éléments visuels, etc., quoi de mieux que de consulter le premier volume de la grammaire de l’image


Retrouvez plus d’analyses d’images ici.

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Philippe Body

Philippe Body

Philippe photographe de voyage professionnel a deux passions : la photographie et le voyage.  Après  … lire plus

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plusieurs séjours en Afrique, il se rend en Asie et c’est l’éblouissement. A la fin des années 80, il réalise ses premiers reportages en Inde, dont un sujet sur l’inaccessible ethnie Muria dans la province reculée du Chattisgarh et le gigantesque projet de barrage Narmada. Plusieurs publications s’ensuivent et ses premiers reportages sont diffusés par l’agence VU. En 1990, il est l’un des premiers photographes à revenir au Vietnam qui sort enfin de son isolement. Cinq ans plus tard, il entre à l’agence Hoa Qui, spécialisée dans la photo de voyage avant de rejoindre en 2007 la prestigieuse agence Hemis.fr. En 2010, il créé le site “www.avecunphotographe.fr” pour proposer ses propres stages et ceux de quelques photographes de grande qualité. Aujourd’hui son travail est diffusé par les agences Hemis.fr – Getty et AGE fotostock ainsi que sur son propre site professionnel www.philippebody.com

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